Tenet : Le paradoxe du palindrome

Tenet Christopher Nolan Pattinson

Dans Tenet de Christopher Nolan, un agent secret est engagé pour sauver le monde d’une Troisième Guerre mondiale. Il ne répète pas sans cesse que son nom est James Bond, mais sa mission est tout aussi importante…

Après avoir été décalé trois fois en peu de temps, les exploitants et l’industrie du cinéma n’ont qu’un mot à la bouche : Tenet. Chaque film de Christopher Nolan est extrêmement attendu et les français pourront le découvrir dès lundi et mardi grâce aux avant-premières exceptionnelles organisées par Warner Bros. Après Dunkirk (film historique), l’homme à tout faire décide de mêler la science fiction au film d’espionnage. Avant de bondir avec un élan de bons sentiments pour sauver le cinéma, peut-être faudrait-il en être à la hauteur ?

John David Washington Elisabeth Debicki Tenet

« N’essaie pas de comprendre, ressens. »

Lorsque le protagoniste du film tente de comprendre les mécanismes temporels, la savante interprétée par Clémence Poésy lui dit : « N’essaye pas de comprendre, ressens ». Peut-être que cette phrase résume le film, mais ce conseil qu’elle lui donne ne peut être suivi par le spectateur. La raison est simple, il n’y a rien à ressentir. Ou plutôt, on ne ressent pas ce qu’on devrait ressentir. Les frissons qui s’accompagnent des premières séquences du prologue (dévoilé il y a quelques temps sur Reddit) provoquent en nous l’espoir de retourner une dizaine d’années plus tôt devant la présentation épique du Joker dans The Dark Knight.

Mais peut-on réellement mettre sur un piédestal un film qui n’a que pour émotions ses scènes d’action ? Lorsque l’on parle de temps et de science-fiction, le plan d’une toupie nous revient en tête, Inception travaillait à sa manière la déformation temporelle mais avec une grâce dramaturgique que ne possède pas Tenet.

Le talon d’Achille du palindrome

Si l’action, tournée en IMAX, en 70mm et en grande partie sans fond vert impressionne, elle est à la fois le point névralgique et le talon d’Achille de ce palindrome. Proposition de cinéma et de science-fiction radicale, le concept d’inversion du temps dans le film paraît simple mais tout n’est qu’illusion. Christopher Nolan prouve lui-même avec ses séquences son caractère alambiqué en tentant d’expliquer à chaque dialogue son concept, mais en vain. Sans le comprendre, les scènes d’actions (brillantes grâce à la photographie d’Hoyte van Hoytema) avancent à reculons et perdent de leur impact, sans oublier l’acte final où les changements de formats entre l’IMAX et le 70mm sont désagréables. Et paradoxalement, elles incarnent les seuls moments où nous pouvons ressentir quelque chose parce qu’il n’y a aucune thématique forte à laquelle nous raccrocher en dehors de ces séquences impressionnantes.

Elizabeth Debicki Kenneth Branagh Tenet

Un casting 5 étoiles

Malgré le manque de clarté qui découle de ce montage chaotique (probablement lié au scénario, ne blâmons pas la monteuse), Tenet a des qualités à ne pas négliger, dont la présence d’un casting cinq étoiles. Elizabeth Debicki en femme brisée et Kenneth Branagh en oligarque russe Shakespearien tourmenté. John David Washington,  fait oublier son paternel (Denzel Washington) depuis ses débuts grâce à ses choix de films judicieux. Robert Pattinson nous explose également la rétine, prouvant encore une fois son talent indéniable et la longue attente à laquelle nous devrons faire face avant de le découvrir en chevalier masqué chez Matt Reeves.

Comme son précédent film, les protagonistes souffrent de l’absence d’une histoire personnelle qui nous lierait à eux, l’antagoniste n’a pas de nom, les liens entre les personnages sont flous… Et même la dimension sonore ne les aide pas. Ludwig Göransson capte parfaitement les failles temporelles pour y glisser de ses sonorités et ajouter une densité à l’action, mais il manque là encore ce dont chaque film de Christopher Nolan profite depuis des années : des thèmes marquants et aux émotions fortes comme ceux composés par Hans Zimmer pour Inception ou Interstellar

Tenet Robert Pattinson David WashingtonLe grand film qui devait sauver le cinéma le sauvera-t-il ou se résumera-t-il uniquement dans quelques années à la phrase suivante prononcée dans le film « Tu as un avenir dans le passé » ? Avant de penser à sa postérité, espérons tout de même qu’il fasse sensation au box-office. 

3 thoughts on “Tenet : Le paradoxe du palindrome”

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