Le cinéma de genre se fait de plus en plus une place dans le paysage cinématographique de ces dernières années. Quelques temps après le génial Teddy ou encore La Nuée, le spectateur va pouvoir prochainement découvrir Ogre, long-métrage d’Arnaud Malherbe.
Dans Ogre, Chloé (Ana Girardot) arrive dans un village perdu avec son fils Jules (Giovanni Pucci) pour reprendre le poste de professeure de la petite école dudit village. Dans ce lieu quasiment désertique, abandonné par la civilisation, Chloé et Jules vont devoir se faire une place. Les fantômes peuplent autant le lieu que les habitants eux-mêmes. Jules, avant tous les autres, lutte contre les cauchemars de son père, inconnu du spectateur. En parallèle de tout cela, le village est ravagé par un démon à deux faces : la disparition d’un enfant, similaire en tous points à Jules ; et la présence d’une bête sauvage massacrant le bétail des villageois.
Psychologie monstrueuse
Ogre s’oriente donc naturellement vers une ambiance anxiogène, sur laquelle s’appuie principalement le récit. Il y a finalement moins d’ogres que de cauchemars de ces derniers. Inéluctablement, le film souffre d’une certaine lenteur qui ne colle pas à l’idée de ce qu’est le sacro-saint « film de genre ». En réalité, le film d’Arnaud Malherbe apparaît bien plus comme une œuvre psychologique, quasiment introspective. Pourtant, sous ses airs de film où le vide fait loi, Ogre présente de l’ultra cinématographique, tant dans son histoire que son image. Le film marque par ses images fortes et ses acteurs habités, tellement habités que la fiction s’empare peu à peu du réel. Sans que le spectateur ne s’en rende compte, le film parle de lui, de sa propre peur et de ses propres angoisses.
C’est là toute la force de l’œuvre de Malherbe, celle de s’induire dans l’inconscient du spectateur pour lui faire vivre intensément un film qui ne l’est pas tant que cela. En ce sens, Ogre est semi-déceptif : bien que le surnaturel soit vite amené sur le devant de la scène, ou du moins des pistes surnaturelles, le film ne propose que peu de frissons au spectateur qui est en droit de les attendre.
Des personnages trop effacés
Le cul entre deux chaises, le réalisateur/scénariste se sert de la figure surnaturelle/horrifique comme support à sa réflexion plus que comme moteur principal. Certes, le pessimisme global du film a de quoi interroger le spectateur, il en faut tout de même plus pour le captiver de bout en bout. La majorité des intrigues prend trop de temps à se mettre en place, de sorte à ce que le final soit aussi grandiose que frustrant. Les personnages sont sans doute aussi enfermés dans un scénario trop précis qu’ils le sont par cette ville mortifère. Ainsi, bien que le film soit franco-français, on y retrouve les mêmes forces et lacunes du cinéma indépendant américain de ces dernières années, à savoir des thèmes forts (deuil, différence, maladie,…) mais des personnages souvent trop utilitaires.
Ogre a donc cette étrange faculté de pouvoir bouffer le spectateur de l’intérieur comme de pouvoir le laisser sur le carreau. Serez-vous une bonne proie ?