Alors que le ciel gris recouvre le littoral méditerranéen… Le Festival Cinemed 2023 ouvre ses portes pour apporter un peu de chaleur dans nos cœurs de cinéphiles. Au programme : auteurs confirmés et découvertes de premières œuvres, toujours aux sujets actuels et saisissants.
Les festivals ont cette particularité d’être des terrains de rencontre mais aussi de naissance : celle de nouveaux et nouvelles cinéastes à la ferveur de créer. Cette année, c’est le déjà confirmé Özcan Alper qui a remporté l’Antigone d’Or avec Nuit Noire en Anatolie. Pour vous résumer notre passage au Festival Cinemed 2023, découvrez le classement de nos 5 films favoris.
1. 20 000 espèces d’abeilles de Estibaliz Urresola Solaguren, en salles le 14 février 2024
Synopsis : “Lucía, six ans, est une petite fille née dans un corps de garçon. Ane, sa mère, en pleine crise professionnelle et sentimentale, va profiter des vacances pour se rendre avec ses trois enfants dans son village natal, où vivent sa mère et sa tante Lourdes. Cet été qui changera leur vie obligera ces femmes de trois générations différentes à être honnêtes avec elles-mêmes et à décider de la manière avec laquelle elles souhaitent se présenter au monde.”
Notez bien sa date de sortie dans vos agendas. Rare sont les films qui saisissent autant notre attention et notre empathie jusqu’à la dernière seconde de leur générique. Si les abeilles sont nécessaires à notre survie, le dialogue l’est aussi, et le cinéma se révèle alors être un moyen de transmission primordial. Les questions de genre étant encore sources de division, ce portrait ne peut que rassembler.
Portée par une jeune actrice aux yeux remplis de peine et de désir, cette première œuvre signe l’arrivée d’une réalisatrice au talent fascinant. Une équipe formée de reines qui laissent une trace impérissable.
2. La mère de tous les mensonges de Asmae El Moudir, en salles le 28 février 2024
Synopsis : “Cherchant à démêler un tissu de mensonges familiaux, la cinéaste Asmae El Moudir reconstitue avec une maquette et des figurines le quartier de son enfance à Casablanca. À travers sa propre histoire et celle de ses proches, émergent les blessures d’un pays et se révèle l’Histoire oubliée du Maroc.”
Il n’est d’aucune surprise de lire “Oeil d’Or” ou encore “Prix de la meilleure mise en scène à Un certain Regard” aux côtés de son titre. Réel coup de poing dans ce que nous pouvons attendre d’un documentaire, la jeune réalisatrice entre avec force dans le milieu audiovisuel. Nous cloisonnant dans un huis clos plus qu’intime, aux côtés de sa famille, Asmae El Moudir impose un face à face. D’elle à ses proches, de nous à elle, de nous à eux… nous sommes alors spectateurs de luttes, de déchirures.
Pourtant, ce que nous retiendrons malgré nous, c’est aussi la passion immense de la cinéaste et toute la beauté de son âme qui transparait dans son travail. Par l’originalité de sa quête, de ses maquettes, et de la vitalité apporté par ses couleurs et dialogues, elle nous offre une expérience unique et captivante.
3. Matria de Álvaro Gago Diaz
Synopsis : “La vie d’une ouvrière, Ramona, de l’industrie de la conserve alimentaire galicienne. Son quotidien est perturbé lorsque les directeurs de l’usine informent les employés qu’ils ont dû réduire leurs salaires : elle proteste et est ensuite licenciée.”
Nouvelle preuve que le Festival Cinemed est le lieu idéal pour faire partie de l’éclosion d’une nouvelle vague de cinéastes talentueu.ses. Se situant entre le franc-parler de Atlantic Bar et la nervosité de Laure Calamy dans A plein temps, Matria saisie par sa gestion du rythme et des dialogues. En plus de mettre au premier plan une femme désuet, la construction des personnages est remarquablement équilibrée et chacun d’entre eux trouve sa place dans l’intrigue saisissante.
Le film transforme un quotidien malheureux et routinier en un film à suspens sans prétention, qui se contente de suivre son personnage en manque d’oxygène.
4. Notre monde de Luàna Bajrami, en salles le 17 avril 2024
Synopsis : “Kosovo, 2007. Zoé et Volta quittent leur village reculé pour intégrer l’université de Pristina. À la veille de l’indépendance, entre tensions politiques et sociales, les deux jeunes femmes se confrontent au tumulte d’un pays en quête d’identité dont la jeunesse est laissée pour compte.”
Il y a de ces films qui nous plaisent en nous repoussant. Loin d’être mauvais, Notre Monde nous laisse dans un état déconcertant. La proximité mise en scène avec les personnages établit un lien solide avec eux, au point de nous imaginer à leur place. Le malaise s’installe alors face à cette jeunesse du Kosovo en combat perpétuel, qui se lie comme se délie par la force du temps.
En plus de témoigner pour “les oubliés”, un cri de volonté créatrice se fait entendre, autant de la part de la réalisatrice que du casting qui se dessine tel une famille.
5. Excursion de Una Gunjak
Synopsis : “À Sarajevo, une adolescente en quête de reconnaissance révèle qu’elle a eu son premier rapport sexuel en jouant à “action ou vérité” entre collégiens… Prise au piège de son propre mensonge, elle s’invente une grossesse et devient le centre d’une polémique qui prend des proportions incontrôlables.”
Si le Festival Cinemed 2023 tente par toutes les voies de ramener la jeunesse dans ses salles, certains films apparaissent alors tel des évidences dans la sélection. Excursion en fait partie. En plaçant le spectateur comme allié du personnage principal, le film donne l’avantage sur la connaissance des enjeux. Cela sera un élément central puisque tout le principe tourne autour des non-dits, des mensonges destinés à éclater.
Alors qu’il semble impossible de ne pas porter un regard jugeur sur la situation, notre part d’adolescence ne peut entrer qu’en empathie avec Iman. Nous poussant ainsi dans nos remords de jeunesse… et la dureté du regard des autres qui ne nous lâche jamais vraiment.