Zero Impunity est un film réalisé par Stéphane Hueber-Blies, Nicolas Blies et Denis Lambert mêlant animation et documentaire afin de traiter des violences sexuelles lors des conflits armés.
Le sujet, lourd mais important, a de quoi effrayer. Comment aborder un sujet aussi tabou ? Comment être le plus juste possible dans sa réflexion ? Le défi semblait de taille, mais honorablement relevé par l’équipe derrière Zero Impunity. La parole est distribuée à des victimes directes (ou presque) ayant subi des événements traumatisants, et ce dans des divers pays : sont ainsi abordés des conflits tels que les guerres en Syrie, en Ukraine ou encore au Congo. Le spectateur est donc immédiatement convoqué dans son humanité la plus profonde, ne pouvant pas éviter de se sentir touché par des événements qui lui sont tous contemporains et sur lesquels, pour la plupart, il avait fermé les yeux jusque-là.
Ouvrir les yeux
Et c’est d’ailleurs bien là l’objectif du film, celui d’ouvrir les yeux, comme il est annoncé dès le début. Bien sûr que les violences sexuelles commises par des soldats censés s’imposer comme des sauveurs auraient bien trop tendance à ternir l’idée d’interventions bénéfiques. Bien sûr qu’il est compliqué de comprendre à quel point l’ascendant psychologique des soldats aura mené à bien plus d’horreurs que l’on ne peut le voir. Zero Impunity est donc à la fois ce qu’il vise à être, à savoir un film dénonciateur et un film social, mais aussi un film qui interroge profondément les torts de l’espèce humaine et de la société qu’elle a construite.
Dans son argumentaire, le film explore donc de manière pyramidale son sujet : d’abord par des sujets isolés les uns des autres, puis s’attaque aux armées, aux pays, et aux organisations internationales. Comme il est de plus en plus de mise dans les débats sociaux actuels, l’accent est mis sur le côté systémique du problème et sur la dangerosité des élites qui se protègent mutuellement sans prendre en compte le reste. Zero Impunity fait donc naviguer son spectateur entre les témoignages de victimes et ceux ayant fait partie de ces fameuses élites afin de comprendre le mur auquel font face les victimes.
L’animation comme secours
Reste alors cette fameuse division entre l’animation et le live-action : l’animation est utilisée pour les témoignages et la représentation de ces derniers, alors que le live-action montre la mise en place de diverses interventions au coeur de Paris visant à interpeller les passants sur ces violences sexuelles, ainsi que quelques vidéos d’archives des conflits. Il devient alors compliqué de ne pas songer à l’animation comme un effet de style qui a plus tendance à nous éloigner de cette réalité que nous ne voulons pas voir, et que le film ne montre donc pas non plus.
Cette contradiction fait forcément perdre en puissance un film qui ne doit surtout pas faiblir face à la montagne qu’il affronte, qu’il affronte de plein fouet mais qui, par son animation – qui plus est de mauvaise qualité – semble presque minimiser les efforts de toute l’équipe derrière lui. On n’aurait demandé que ça, de voir ces victimes, de se sentir plus encoure plus touchés, encore plus impliqués par ce discours.
Le film compte visiblement sur cet effet pour se rendre original et combler ses lacunes en terme de forme, là où le propos est d’une complexité et d’une profondeur d’une justesse folle, qui ne tire pas les larmes de son spectateur mais qui le guide avec succès vers une réflexion et une prise de position dans la lutte que Zero Impunity met en place et qui se doit d’être défendue.
Le film est actuellement disponible sur le site du festival d’Annecy, dans la catégorie “Programmes spéciaux”.