Skin : guérir de l’extrêmisme ?

Skin Guy Nattiv CinéVerse

Skin est le long-métrage tiré du court-métrage éponyme sorti l’année dernière et vainqueur de l’Oscar du meilleur court-métrage en 2019, réalisé par Guy Nattiv.

Skin raconte l’histoire vraie de Bryon Widner, suprémaciste blanc ayant décidé de changer de vie pour se remettre dans le droit chemin, tout en aidant le FBI à identifier et démenteler le réseau suprémaciste auquel il appartenait.

Le cinéma étant toujours politique, il l’est particulièrement depuis que Trump est arrivé au pouvoir aux États-Unis. Les consciences se sont réveillées et ont touché le cinéma au passage. Après les événements de Charlottesville, les spectateurs avaient eu le droit au très moyen BlacKkKlansman de Spike Lee. Ils ont maintenant Skin, un long-métrage qui s’attaque à l’autre côté de l’histoire, le penchant sombre des idées politiques qui prolifèrent.

Le réalisateur arrive étrangement a ne pas tomber dans le jugement moral, constat d’autant plus étonnant que l’homme est israélien et entretient donc, culturellement, un rapport fort avec la population décrite dans son film. Cette dernière est certes dépeinte de manière négative (comment faire autrement ?) mais, tout de nuance vêtu, le film s’attarde sur le côté humain derrière le groupe suprémaciste, son esprit de famille primordial et, bien sûr, la remise en question de certains membres. Difficile d’accorder le pardon à un criminel notoire magnifiquement joué par Jamie Bell, et pourtant, Nattiv ne cesse de rediriger notre regard vers la quête d’une rédemption touchante et difficile.

Le parcours semé d’embûches du personnage était à prévoir, mais il est surtour capable de défier toute limite morale. Le film marque bien plus en le sachant tiré d’une histoire vraie car il est en effet possible de s’imaginer que la réalité ne devait pas être bien loin de la représentation. La violence physique et psychologique du film est donc décuplée, mais sa force l’est de même.

Finalement, le réalisateur s’impose peu de limite mais arrive à ne jamais transgresser le seuil de l’acceptable, même si le spectateur peut difficilement légitimer la rédemption du néo-nazi. Le film amène donc naturellement un questionnement moral, tant de la part des personnages que du spectateur. Il reste cependant dommage de ne pas s’attarder sur tout un pan de l’histoire, celle du journaliste noir Daryle Jenkins (incarné par Mike Colter), l’homme derrière la rédemption de plusieurs suprémacistes, dont le fameux Bryon Widner. Il est en effet assez étonnant de faire un film sur la rédemption tout en abordant à aucun moment la question du pardon.

Skin Guy Nattiv Jamie Bell CinéVerse

Skin est donc un film audacieux, violent et plus que politique. À une époque comme la nôtre, il interroge intelligemment la place de l’extrêmisme dans nos vies, et encore plus dans celles des suprémacistes. Le débat moral reste bien évidemment le point d’orgue d’un film qui dépasse le simple biopic, principalement grâce à une narration bien rythmée.

 

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