MORTELLE RACLETTE | Entretien avec François Descraques

Votre estomac est tiraillé mais vous ne diriez pas non à une dernière tranche de Mortelle Raclette ? Pas de crainte, si celle-ci vous attaque ce ne sera que d’une crise de rire (ou de frissons).

Le Père Noël porte le nom de François Descraques cette année. Dans sa hotte, il transporte précieusement une comédie horrifique tout droit sortie des années 70 nommée Mortelle Raclette. Disponible dès le 25 décembre sur Canal+ (une création décalée), le réalisateur nous a confié quelques mots avant sa projection au Paris International Fantastic Film Festival.

« L’héritier d’une boîte de films X décide de faire évoluer le genre en engageant, pour son nouveau film TIRE-FESSES, une coordinatrice d’intimité également formée aux tournages éco-responsables. Une première pour elle. Et pour l’équipe qu’elle va accompagner. Mais la petite troupe, en tournage dans un chalet savoyard isolé, va vite se retrouver coupée du monde par une tempête de neige et une panne de wi-fi. Pendant ce temps, à quelques centaines de mètres, un glacier rejette vivant un chasseur alpin disparu en 1888, qui va découvrir que l’équipe du film squatte son ancien chalet. Pas de bol, il est gymnophobe (phobique de la nudité). »

© Augustin Detienne/CANAL+
Après Le Visiteur du Futur, tu signes ton retour à la réalisation avec Mortelle Raclette. Peux-tu nous expliquer quand et comment tu es arrivé sur ce projet ?

F.DESCRAQUES : Ohlala ! (rires) En temps normal lorsqu’on t’appelle pour un projet, surtout un long métrage, tu te dis « Ah, on tourne dans un an ». Et là, quand Empreinte Digitale m’ont appelé, ils m’ont dit « Écoute, on a un super projet pour toi. C’est de l’horreur, c’est de la comédie ». Je me suis dit que c’était trop bien. Et ils ont rajouté « C’est dans deux mois ». C’était en mars/avril dernier. J’étais hyper content parce que je voulais travailler avec eux depuis longtemps. Et je ne pensais pas qu’ils allaient m’appeler comme ça pour un projet aussi rapide et aussi fou. Fallait pas réfléchir et foncer.

Finalement, tout se fait très rapidement. Tu arrives sur le projet, en suit le tournage et la sortie du film se fait quelques mois après.

F.DESCRAQUES : Mon premier film (Le Visiteur du Futur) j’ai mis 6 ans à le faire. Celui là, il a été fait en 6 mois. C’est pas du tout la même temporalité, le même stress,…


« J’ai trouvé ça hyper excitant et je me suis dit qu’il fallait pas réfléchir. J’ai pas hésité très longtemps.»


Et qu’est-ce qui t’a convaincu d’intégrer Mortelle Raclette ? Est-ce que c’était l’idée de pouvoir jouer avec différents genres ?

F.DESCRAQUES : C’est ça. C’est l’opportunité improbable de faire un projet clé en main aussi fou. Il y avait un côté expérimental parce que même si le scénario était déjà écrit, il y avait tellement de choses à créer artistiquement. On découvrait quelque chose de nouveau que Canal+ ne faisait pas trop, à savoir des unitaires. J’ai trouvé ça hyper excitant et je me suis dit qu’il fallait pas réfléchir. J’ai pas hésité très longtemps. Et j’avais pas le temps d’hésiter aussi (rires) !

C’est un vrai film de cinéphile, il y a beaucoup de références. Est-ce que tu as pu convoquer ta propre culture cinématographique dans les dialogues, l’esthétique,… ?

F.DESCRAQUES : Mon exercice c’était de mettre une touche audiovisuelle : l’ambiance sonore, l’ambiance visuelle, la direction artistique. J’ai rajouté des références qui n’y étaient pas mais de façon plus indirecte. Des références à Evil Dead, Twin Peaks,… J’ai pu en mettre sans forcément les appuyer. C’est vrai qu’il y a un personnage qui les appuie beaucoup dans les dialogues mais moi c’était plus subtil.

© Augustin Detienne/CANAL+
Mortelle Raclette se passe dans un chalet. C’est un huis clos, mais tu y intègres beaucoup de mouvement, de points de vue,… Comment s’est déroulé ton travail pendant le tournage ? Est-ce que tu as vu ce huis clos comme une contrainte ?

F.DESCRAQUES : Le premier enjeu c’était de trouver le lieu. Le scénario se passe en Savoie en hiver et on tournait en région parisienne. Mais Empreinte Digitale m’ont tout de suite rassuré et m’ont fait comprendre que c’était pas impossible. Le premier chalet qu’on a trouvé était parfait. Le décor était grand, je pense qu’on a filmé que les deux tiers du décor. Chaque fois qu’on ouvrait une porte on se disait « Quoi ? C’est quoi ce truc là ? Il faut qu’on le filme ! ».


Le vrai problème c’était lorsqu’on sortait du chalet. On était à Rambouillet !


Le vrai problème c’était lorsqu’on sortait du chalet. On était à Rambouillet. Pour moi, le plus gros tour de magie c’est ça. Bien sûr, on avait quand même cette marge artistique d’être dans un film très codifié années 70/80, donc on pouvait faire des effets un peu exagérés. Le mélange des SFX (neige sur le plateau) et des VFX (neige numérique) fait que ça marche. Il y a des plans, je pense que personne peut se douter que c’est de la fausse neige VFX, tellement elle est bien faite.

Est-ce que c’était une tâche difficile de trouver l’équilibre entre l’horreur et la comédie ?

F.DESCRAQUES : On savait que plus le film progressait, plus il allait vers l’horreur. Mais les gags arrivent quand même. Plus tu la joues premier degré, plus t’es terrifiant, et plus t’as envie de relâcher la pression. Je savais qu’on allait pas perdre en comédie. Il fallait que chaque mort soit grotesque, ça permettait de dédramatiser.

Ce qui est très important, c’est aussi les comédiens. Lorsqu’ils jouent de l’horreur, ils le font premier degré et c’est ça qui permet qu’on ne soit pas dans la farce tout le temps. Sans spoiler, vers la fin il y a un personnage qui apparaît et je voulais qu’on y croit un tout petit peu.

© Augustin Detienne/CANAL+
Dans Mortelle Raclette, tu tournes avec des comédiens que tu ne connais pas au préalable. Pourtant, une ambiance familiale émane du projet. Quelle était l’atmosphère sur le tournage ?

F.DESCRAQUES : Ce qui est fou, c’est que les comédiens se connaissaient un peu par hasard. On les a castés un par un mais il y en avait qui avaient déjà tourné ensemble dans des séries sur internet. Comme il y avait cet esprit de troupe dès le départ, tout le monde était content de briller à son moment. C’était vraiment génial de travailler avec eux, de les mettre dans cette ambiance. Ce qui est marrant, c’est que ça parle d’un tournage de film X mais on l’a traité comme si c’était un tournage de court métrage étudiant. Chaque plan était chorégraphié avec une coordinatrice d’intimité, ça a mis à l’aise tout le monde, moi le premier.

Le film sort le 25 décembre sur Canal+, il n’aura donc pas de sortie en salles. Mais certains chanceux vont le découvrir au Paris International Fantastic Film Festival. Ce n’est pas la première fois que tu te rends à ce festival. Peux-tu nous en dire quelques mots ?

F.DESCRAQUES : On savait qu’on avait peu de temps entre le moment où le film allait être terminé et sa diffusion. Il n’allait pas y avoir beaucoup de festivals qui allaient l’accepter. Le seul qui le pouvait c’était le PIFFF. Moi, j’avais été jury court métrage (2017) puis jury Climax (2023) donc j’y vais plutôt régulièrement. C’était parfait, d’autant plus au Max Linder qui est la plus belle salle de Paris. Donc on s’est dit qu’il fallait le tenter à fond. On savait qu’on allait pas être en compétition, que ça allait être quelque chose d’événementiel. C’est un cadeau.

– Entretien réalisé le 8 décembre 2024 dans le cadre du PIFFF

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