Mes Jours de Gloire : un Lacoste sur-mesure

Avec son premier long métrage Mes Jours de Gloire, le réalisateur Antoine de Bary creuse le sillon du « Vincent Lacoste movie », ce nouveau genre cinéphilique français qui, film après film, confronte ce talentueux acteur aux tourments du passage à l’âge adulte.

L’Antoine Doinel des millenials ? Depuis son premier rôle loufoque dans Les Beaux Gosses de Riad Sattouf (2009), Vincent Lacoste a fait de son allure de jeune adulte mi-arrogant mi-empoté, un style à part entière. Dans Mes Jours de Gloire, il endosse le costume d’un comédien vingtenaire, Adrien, ancien enfant-star qui n’a jamais confirmé, et qui décroche par erreur le rôle du General de Gaulle (rien que ça). Antoine de Bary prolonge et développe ici son premier court métrage, L’Enfance d’un Chef (2006) où Lacoste tenait déjà le même rôle.

Adrien n’a plus d’appart, plus de revenu, plus d’amis, plus d’érection, alors il retourne se reconstruire chez ses parents (Emmanuelle Devos et Christophe Lambert). Tout du moins, il essaye de se refaire un moral dans ce foyer familial, entre une mère envahissante, un père déprimé et un biopic de Charles de Gaulle à préparer pour le cinéma. Car peut-on incarner De Gaulle, lorsqu’on n’a plus la gaule ? Le décalage entre la puissance du Général, et l’impuissance de Lacoste, est certes un des ressorts comiques du film, mais il permet également, l’air de rien, de souligner l’évolution de la notion de virilité, en un demi-siècle.

Peut-on être De Gaulle quand on n’a plus la gaule?

Un schéma viriliste d’antan, avec lequel le anti-héros Adrien n’est pas en phase. Comment peut-on avoir vingt-sept ans, à peine, et se sentir déjà has-been dans sa profession, et même dans sa vie dans son ensemble ? Ce questionnement précoce sur le sens de l’existence, Vincent Lacoste y apporte une réponse évidemment lunaire, entre péripéties abracadabrantes et gaffes monumentales, quelques 400 coups et autres Baisers Volés.

Lacoste possède ce don peu commun de façonner l’absurde avec presque rien, un geste, une grimace, ou de provoquer le malaise avec un marmonnement aussi incongru que maladroit. Ses pérégrinations parisiennes – et presque trufaldiennes – se suivent sans déplaisir, inspirant une véritable tendresse et amusement pour son personnage principal. Mais, quand on constate que pudiquement caché derrière le masque du clown, demeure un profond mal-être dépressif du héros, alors on ne rit plus.

Le Faux-Follet

On pense alors deviner pour lui un destin de Feu-Follet comme chez Louis Malle, où Vincent Lacoste, comme Maurice Ronet avant lui, emprunterait les chemins suicidaires d’un jeune homme dont la flamme s’est éteinte hâtivement. Malheureusement, le script de Mes Jours de Gloire n’a pas l’épaisseur du texte de Drieu la Rochelle. Il ne parvient jamais à donner de corps à la face sombre de son protagoniste, à mesure que sa situation personnelle s’aggrave et que son horizon se referme. Comme le fait Adrien dans son quotidien, le scénario s’en tirera par une dérobade, au prix d’un bon mot – et d’une jolie scène – en contournant le versant tragique de la vie.

« Je me presse de rire de tout, de peur d’être obligé d’en pleurer » écrivait Beaumarchais. Mes Jours de Gloire semble faire sien cet adage, au risque, peut-être, de quitter la scène sans avoir livré son secret, sur une pirouette.

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