Nerkonda Paarvai est un film essentiel dans son fond mais vide dans sa forme. Une plaidoirie pour la liberté de la femme et l’importance du consentement qui se perd dans un film à rallonge qui exploite des pistes inutilisables.
Nerkonda Paarvai est un remake tamoul de Pink (2016). Si la question de l’utilité d’un remake dans un même pays est questionnable, il faut savoir que Bollywood et Kollywood sont 2 industries très différentes et que l’utilité n’est pas tant dans la volonté de faire un meilleur film, mais dans le but de sensibiliser les spectateurs tamouls à cette culture du viol qui était développée dans son prédécesseur hindi.
Trois jeunes femmes blessent un homme aisé lors d’une tentative de viol. Elles doivent s’en remettre aux mains d’une justice corrompue…
Le droit des femmes et le consentement sont des thématiques au coeur de la société actuelle. Après des époques de dominations et des injustices toujours présentes, les femmes parlent, luttent, pour obtenir ce qu’ont les hommes. Ce qui n’est pas uniquement un salaire plus élevé, mais également une paix morale et physique, loin de subir un harcèlement sexuel de la part des femmes. Nerkonda Paarvai a pour but principal de mettre en avant la culture du viol, notamment lors des scènes de procès où l’argumentaire de l’avocat met en avant des comportements et des attitudes qui minimiseraient ou inciteraient à l’agression sexuelle.
Si le film a ce fond dense et qui donne à réfléchir, il n’en est pas de même pour sa forme. Dès son introduction, le rythme proposé par le réalisateur H.Vinoth est anarchique. De sa scène d’introduction festive avec un concert, puis son long générique interminable… Les ennuis commencent. Impossible de ne pas comparer le film avec sa version Bollywood, Pink. Des scènes jusqu’aux dialogues, parfois de la valeur du plan jusqu’aux personnages, tout semble concorder sauf… La qualité de l’un qui fait souffrir l’autre. Nerkonda Paarvai possède 30 minutes de plus que Pink, et c’est majoritairement dans ces 30 minutes supplémentaires qu’il souffre. Si le film original allait directement là où il fallait aller sans passer par quatre chemins, le remake en fait trop et propose du contenu additionnel qui ne coïncide pas avec l’ambiance du film.
C’est en grande partie le personnage d’Ajith qui souffre d’un manque de cohérence en voulant lui donner plus de profondeur. Il valide dans ce film le cahier des charges de Kollywood : la grande star qui doit attirer le public, la bipolarité dépeinte vulgairement et lui donnant un côté Ghajini, la fameuse scène de combats pour satisfaire les fans, le flashback qui n’apporte rien à sa personnalité… Ajith Kumar reste malgré tout exceptionnel dans ce rôle. C’est un acteur qui a une présence colossale à l’écran, et il parvient ici à s’effacer (en restant dans le plan) pour laisser exister les femmes. Si son personnage souffre d’un manque de cohérence, le film fait du surplace sur le background du coupable en diabolisant (naïvement) sa famille, ne sachant alors pas où se placer entre le procès, le personnage de Bharath et les agissements de la famille.
Nerkonda Paarvai est un film bénéfique pour son grand acteur et qui attirera donc un grand public. Mais malgré le jeu d’acteur subtil d’Ajith Kumar et les quelques scènes au tribunal, le spectateur ne retiendra absolument rien de ce film qui se perd dans sa mise en scène bancale et vide.