Après Les Combattants (2014), Thomas Cailley revient cette année avec Le Règne Animal, un film français salué pour son audace lors de l’ouverture de la catégorie “Un certain Regard” à Cannes.
2023 est une année riche en films français toujours plus ambitieux : d’une réadaptation d’un roman comme Les Trois Mousquetaires (dont sa seconde partie sortira le 13 décembre prochain), à un film de catastrophe naturelle comme Acide de Just Philippot ou encore Le Règne Animal, nouveau long-métrage de Thomas Cailley.
“Dans un monde en proie à une vague de mutations qui transforment peu à peu certains humains en animaux, François (Romain Duris) fait tout pour sauver sa femme, touchée par ce phénomène mystérieux. Alors que la région se peuple de créatures d’un nouveau genre, il embarque Émile (Paul Kircher) leur fils de 16 ans, dans une quête qui bouleversera à jamais leur existence.”
Un projet ambitieux
Tout d’abord, soulignons l’ambition du projet. Entre Titane ou La Nuée, le cinéma français se permet depuis quelques temps de retourner vers le cinéma de genre, et de body horror en particulier. En effet, le point clé de l’histoire reste l’interaction entre ce père et son fils Emile face à un monde en mutations.
Qui dit mutations dit effets spéciaux : le film a un budget de “seulement” 15 millions d’euros (bien en-dessous comparé à d’autres films français de l’année comme Astérix et Obélix l’Empire du Milieu a 65 millions ou Les Trois Mousquetaires atteignant le seuil des 70 millions d’euros pour les 2 parties réunies). Là encore, c’est un pari réussi en utilisant dans un format hybride différents types d’effets spéciaux : le maquillage, les effets spéciaux plateau (câblage) et numérique (la post-production).
Une mutation des genres
La rage, telle celle d’un animal, peut illustrer nombre d’émotions vécues dans Le Règne Animal. Mais cette gravité ne se départi pas d’un certain humour, grâce notamment à la relation entre François et Emile, toujours complice et souvent drôle. D’autre part, le film touche juste sur les thèmes qu’il aborde. En effet, la mutation littérale n’est qu’un prétexte pour traiter métaphoriquement de thèmes plus contemporains comme l’émancipation, la filiation, l’acceptation de soi ou la relation aux autres espèces.
Ce qui marque dans ce film est cette frontière presque invisible entre la vie quotidienne et le fantastique. En effet, tourner des scènes au lycée, en soirées entre adolescents, ou même dans un supermarché contribuent à cette normalité, un routine du quotidien qui contraste avec les mutations qui continuent hors champ. Ce mélange des genres et ces ruptures de tons sont pour le réalisateur, des inspirations revendiquées des films de Bong Joon-ho.
Un Pandora à la française
Ambition française oui, mais influence américaine aussi. On retrouvera facilement dans Le Règne Animal des références à des blockbusters iconiques du genre. Si le réalisateur assume l’influence de Spielberg (ET) et de M.Night Shyamalan (Sixième Sens), on pense au Avatar de James Cameron (2009). En effet, certains lieux forestiers et nombre de plans peuvent rappeler le monde de Pandora : un monde rempli de découverte, d’exploration et de créatures.
On retrouve également ce sentiment d’aventure dans le film de Thomas Cailley, pour les protagonistes comme pour le spectateur, qui se retrouve immergé dans un monde identique au sien, mais avec cette dose supplémentaire de fantastique. On est curieux de découvrir le nouveau mutant apparaître à l’écran, servis par une belle diversité : d’un poulpe, à un aigle en passant même par un caméléon.
Pour conclure, le Règne animal est une véritable réussite mêlant la nature, l’amour, la différence et la famille dans un monde en pleine mutation. On retrouve l’action, l’émotion et l’ambition au service du message du film : une transition de l’homme à l’animal, tel l’adolescent se transformant en adulte.