Attention, avec Chien de la casse, Jean-Baptiste Durand débarque sur grand écran pour offrir un cinéma mêlant brutalité et maladresse. Nous avons pu l’interviewer, ainsi que son comédien Raphaël Quenard.
Dans Chien de la casse, Dog (Anthony Bajon) et Mirales (Raphaël Quenard) sont amis d’enfance. Ils vivent dans un petit village du sud de la France et passent la majeure partie de leurs journées à traîner dans les rues. Pour tuer le temps, Mirales a pris l’habitude de taquiner Dog plus que de raison. Leur amitié va être mise à mal par l’arrivée au village d’une jeune fille, Elsa, avec qui Dog va vivre une histoire d’amour. Rongé par la jalousie, Mirales va devoir se défaire de son passé pour pouvoir grandir, et trouver sa place.
Traitant d’un sujet qui lui est intime sans jamais délaisser la photographie ou la musique, le réalisateur nous emporte avec douceur dans les campagnes oubliées. Celles où les liens se tissent et se fissurent avec amertume, mais ne se défont jamais. Raphaël Quenard se voit enfin offrir un premier rôle avec Chien de la casse, qui le révèle à la fois sous sa plus grande force comme sa plus grande sensibilité.
Pourriez-vous nous recontextualiser le point de départ du film ?
J.B DURAND : Le point de départ… C’est presque une synthèse, un film qui vient cristalliser des recherches et un travail de toujours. Moi j’ai grandi dans ce type de petits villages péri-urbains et dès que je suis rentré aux Beaux Arts j’ai commencé à peindre les copains de mon village. C’était une évidence, je devais parler de ces liens là que j’avais connu.
Le scénario nous plonge dans un environnement qui vous est assez personnel. On voit au générique que vous avez collaboré avec Emma Benestan et Nicolas Fleureau. Qu’est-ce que vous ont apporté ces deux scénaristes ?
J.B DURAND : J’ai collaboré avec eux mais il y a eu beaucoup d’autres personnes avant. J’ai commencé l’écriture en 2016, et j’ai participé à deux résidences. Il y avait donc des processus d’accompagnement et on interagissait sur les projets des uns et des autres. Après avoir monté deux versions du scénario, je me suis retrouvé un peu épuisé. J’avais besoin que quelqu’un vienne réinjecter un souffle dans la structure. Nicolas m’a apporté une solidité dans la structure, notamment dans la seconde partie du film. Et Emma est venue sur la toute fin du film, notamment sur le personnage féminin d’Elsa.
« Quand on cherche des premiers rôles, on choisit pas trop. Mais cette fois, je pouvais faire corps avec ce personnage »
Emma Benestan a déjà travaillé avec Raphaël Quenard sur le film Fragile. C’est elle qui vous l’a recommandé ?
J.B DURAND : Non, elle m’a dit « surtout pas » ! Non en fait, j’ai rencontré Halima Ouardiri en résidence et elle a fait un atelier 1000 visages comme Emma. Elle a parlé à Raphaël du personnage de Mirales. Après ça, il y a eu un jeu du chat et de la souris pendant un an, avec le comédien qui m’envoyait sa bande démo. On me disait qu’il était fort en improvisation mais je voulais un comédien qui soit capable d’assumer une trajectoire, une finesse, un texte.
Pourquoi s’être autant accroché à ce projet, Raphaël ?
RAPHAËL QUENARD : Quand on cherche des premiers rôles, on choisit pas trop. Mais cette fois, Halima Ouardiri me disait vraiment que je pouvais faire corps avec ce personnage. Je me suis accroché, mais comme je m’accrochais à toutes les branches auxquelles je pouvais m’accrocher. Je savais même pas de quoi le film parlait. J’avais fait des séries, des petits rôles,… jusqu’à Family Business qui m’a permis d’obtenir plus de propositions par la suite.
Pour revenir au scénario, est-ce que la musique avait une place importante dès l’écriture de Chien de la casse ?
J.B DURAND : La musique a eu cette place très tôt. J’ai rencontré Delphine Malausséna dans une résidence en 2017 et il y a eu un coup de foudre assez immédiat. Je voulais travailler avec elle, on s’est revu assez régulièrement. Et un jour, mon cousin jouait un concert Violoncello, qui mélange des chœurs au violoncelle, c’était une alliance inédite. Et en entendant ça, j’ai trouvé que c’était à la fois hyper moderne et classique, très cinématographique. J’ai appelé Delphine pour lui dire que c’était ça la musique du film et on a travaillé 3 ans dessus. Je voulais vraiment que la musique soit pas dessus la pudeur des personnages, qui disent pas les choses. Elle venait dire « je t’aime, c’est évident ».
« Parfois, faire de l’improvisation ça consiste aussi à se taire, à faire un silence qui n’était pas prévu. »
Pour le rôle de Mirales, vous avez eu l’autorisation de faire de l’improvisation, des suggestions ou autre sur le tournage ?
RAPHAËL QUENARD : J’aime bien suggérer des idées au réalisateur. Après il garde, il garde pas… il se trouve qu’il en a gardé 80 % ! Non, mais par contre ce que j’adore avec Jean Baptise, c’est qu’il a son texte mais il est pas fermé à des propositions, ce qui nous offre une liberté d’interprétation. Je pense qu’on connaît mieux un acteur par ses rôles que par les échanges comme celui qu’on a là. Je me sens proche de Mirales donc je pouvais lui donner beaucoup de moi même.
J.B DURAND : Ce que j’aimais beaucoup chez Raphaël, c’est qu’il avait toujours l’intelligence de connecter son verbe à la musique du personnage. C’était pas de l’improvisation gratuite, c’était toujours hyper intelligent. Parfois, faire de l’improvisation ça consistait aussi à se taire, à faire un silence qui n’était pas prévu.