The Agency (Showtime/Canal +) : Un remake réussi du Bureau des légendes ?

Remake de la série française à succès « Le Bureau des légendes », The Agency transpose l’intrigue de la DGSE dans les bureaux londoniens de la CIA.

Entre trahisons, amours contrariés et enjeux géopolitiques majeurs, tous les ingrédients de l’œuvre d’Éric Rochant sont là pour accoucher d’une première saison réussie de The Agency et d’un grand succès public pour Showtime, qui n’évite pas toutefois la question que tout le monde se pose : était-ce réellement utile ?

« Martian, un agent de la CIA, de retour à la base de Londres, peine à laisser sa dernière couverture derrière lui. Quand la femme qu’il a aimé refait surface, la romance renaît. Une relation contre les règles, qui met sa carrière et sa véritable identité en danger. Partagé entre le coeur et la raison, il se retrouve propulsé dans un jeu dangereux, sur fond d’intrigues internationales et d’espionnage. »

© Canal + / Showtime

De Malotru à Martian, la classe américaine

Qui dit œuvre américaine, dit forcément plus grand spectacle. S’éloignant (un peu) de la tradition feutrée d’Éric Rochant, The Agency ne peut s’empêcher de dépeindre le monde des espions avec un poil plus de nervosité. On a ainsi droit aux classiques courses dans les couloirs, aux paniques généralisées et aux gros plans sur des visages dépités ou surpris. Loin d’être un point négatif cependant, cette touche américaine apporte à The Agency un élément so 2020’s qui lui sied à merveille. En effet, dans le monde post-Covid qui est le nôtre, n’est-on pas tous devenus fous…?

À rebours de cette folie douce qui s’empare parfois du scénario, la troupe d’acteurs est quant à elle en remarquable maîtrise. Sans avoir rien à envier à Matthieu Kassovitz, Michael Fassbender signe une interprétation tout en nuances, qui crée de l’empathie pour le personnage tout en lui donnant ce je-ne-sais-quoi de mystère propre à l’espion pour garder une certaine distance avec le spectateur. En somme, son personnage est aussi attachant qu’il est impénétrable, et c’est exactement le juste milieu qu’il fallait trouver.

Aidé par un casting parfait comme il l’a été dans The Insider, Michael Fassbender nous fait vivre une année 2025 sous le signe des agents doubles et des hommes insondables. Ça tombe bien, c’est là qu’il a toujours le plus excellé.

© Canal + / Showtime

Une plus-value limitée pour les connaisseurs du Bureau des légendes

Feutrée tout en étant parfois endiablée, maîtrisée tout en sachant laisser poindre des moments de folie, The Agency est donc, en elle-même, une série réussie. Nous écrivons bien « en elle-même » car si elle avait été originale, nous aurions bien évidemment crié au génie. De 2015 à 2025, les enjeux ont changé mais leur traitement reste toujours aussi judicieux : si on garde l’Iran car c’est toujours d’actualité, les deux autres arcs narratifs se situent au Soudan et en Ukraine, là où deux conflits font rage ces dernières années.

Mais en tant que spectateurs (et immenses fans) du Bureau des légendes, on ne peut s’empêcher de faire la comparaison. C’est un sentiment étrange, car on ressort de The Agency avec un sentiment d’entre-deux : la série est aussi réussie qu’elle est inutile dans un sens, car elle ne s’éloigne que trop peu de l’originale pour avoir une vraie plus-value. Comme pour Malotru, Martian a une histoire d’amour compliquée, une jeune espionne à entraîner pour l’envoyer en Iran, et une grande crise internationale à gérer. Les arcs narratifs sont les mêmes et leur résolution l’est aussi peu ou prou.

L’agence sans risque

La question qui reste est alors de se demander pourquoi ? Pourquoi faire un remake si ce n’est pour ne faire que copier l’original ? The Agency est-elle une bonne série d’elle-même, ou l’est-elle parce que le matériau original est aussi génial ?

À cette question, il n’y a pas de réponse évidente. Il faut apprendre à aimer The Agency pour ce qu’elle est, et laisser le Bureau des légendes dans les annales de l’histoire. C’est le lot de tous les remakes au fond et la leçon à retenir : si on ne se détache pas de l’original en tant que spectateur, on n’appréciera jamais l’œuvre nouvelle à sa juste valeur. Alors allons-y et laissons à Michael Fassbender le bénéfice du doute. Enfin, pas trop… de Paul Lefevre à Paul Lewis, les apparences sont trompeuses.

Très maîtrisée, The Agency est assurément une série à regarder, tant elle détonne dans le domaine d’habitude si spectaculaire des thrillers d’espionnage américains. Bénéficiant de la base solide d’Éric Rochant et servie par un casting remarquable, la série peine toutefois à se démarquer de sa grande sœur, manquant d’originalité dans sa construction. Si vous n’avez jamais vu Le Bureau des légendes, vous adorerez The Agency. Si vous avez déjà suivi les aventures de Malotru, vous passerez un tout aussi bon moment, mais sans le sentiment d’originalité qui nous avait impressionnés en 2015… 

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