Porté par Adèle Exarchopoulos en tête d’affiche, Planète B d’Aude Léa Rapin se présente comme une production de science-fiction luxueuse à l’échelle hexagonale. Sa mise sur orbite est-elle réussie ?
Par ses thèmes engagés, Planète B est rempli de promesses : de la science-fiction dystopique, de l’actualité et du parti-pris politique. Aude Léa Rapin suit un groupe d’éco-terroristes enfermés dans la prison virtuelle. Ils sont régulièrement visités par Nour (Souleila Yacoub), réfugiée politique contrainte de dissimuler son passé de journaliste. Mais des sujets aussi contemporains que polémiques, ne garantissent pas toujours de captiver le spectateur..
« France, 2039. Une nuit, des activistes traqués par l’État disparaissent sans laisser aucune trace. Julia Bombarth (Adèle Exarchopoulos) se trouve parmi eux. A son réveil, elle se découvre enfermée dans un monde totalement inconnu : PLANÈTE B. »
Punishment Park, sans la punition ni le parc
Tout commence avec le choix de la mise en scène. Le film se veut un genre de Punishment Park, plus dystopique qu’uchronique, en reprenant sa prémisse : des opposants politiques enfermées et torturés dans une prison à ciel ouvert.
Mais plutôt que de développer ce pitch prometteur, on passe notre temps à attendre. Quoi ? Même le film semble ne pas le savoir. Regarder Planète B, c’est se confronter à une exposition qui n’en finit plus. C’est là son gros point noir : le rythme, ou plutôt l’absence de rythme. Le film dure pourtant 1h58, qu’il faut bien remplir.
Là où Peter Watkins prenait le parti de l’unité de lieu de Punishment Park pour unifier l’action, Aude Léa Rapin choisit de briser le huis-clos de la geôle. Le but : montrer les conséquences d’une surveillance numérique de masse à la fois sur des activistes et sur les réfugiés politiques. Les allers-retours entre le virtuel et le réel se multiplient alors à travers le personnage de Nour, interprété par Souleila Yacoub.
Au final, l’action se disperse bien plus qu’elle n’éclate. Elle est à la fois partout et nulle part, elle s’annonce en permanence mais reste attendue, sans jamais se réaliser effectivement.
Planète série B
A ce world-building velléitaire s’ajoute une certaine pauvreté de l’écriture. Planète B s’ouvre sur un panneau indiquant au spectateur qu’il a affaire à des écoterroristes. Pourtant rien, dans leur morale ou leurs actions, ne renvoie à une quelconque radicalité. Leur mantra ? Pas de violence, et surtout pas envers les policiers. Leurs initiatives ? Taguer le logo de leur groupe sur de la boue. Les méga-bassines de Sainte-Soline n’ont qu’à bien se tenir. Aude Léa Rapin déclarait pourtant vouloir illustrer ici les qualifications abusive de « terrorisme », visant à disqualifier les mouvements écologistes. Cette contradiction dans l’exécution brouille le message initial de la réalisatrice.
Le reste du film se révèle à l’image de cette ouverture : il nous dit, nous explique, sans rien nous montrer. Tout en nous vendant un engagement politique avec des thèmes forts comme la répression judiciaire ou les violences policières, Planète B se révèle finalement aseptisé. Tout comme les personnages, les dialogues sont dépourvus de complexité. Ne cherchez pas d’autres niveaux de lecture : il n’y en a qu’un, celui qui nous est constamment donné.
Si tout est expliqué, à quoi donc réfléchir ? L’ennui commence à poindre. La performance d’Adèle Exarchopoulos aurait pu équilibrer la littéralité du propos. Elle nous laisse surtout un goût amer.
L’avide Adèle
Adèle Exarchopoulos est brillante, chacun le sait. Ça ne peut d’ailleurs échapper à personne, puisqu’elle trône dans la plupart des succès cinématographiques français de ces dernières années. Dans Planète B, comme partout, elle est époustouflante.
Mais tout en se montrant gourmand sur ses choix de casting, la production se découvre, sur d’autres aspects, un soudain attrait pour l’écologie ; en témoigne le recyclage intempestif de plans de coupe et de décors. Le film voulait-il se montrer au niveau de ses personnages ultra-engagés pour le climat ? Sans doute Planète B aurait-il pu se passer de l’actrice à l’affiche du deuxième film français le plus cher de l’année, et investir dans des images à la hauteur de ses justes ambitions.
Planète B d’Aude Léa Rapin gravite autour de son étoile Adèle Exarchopoulos mais ne parvient pas à éclipser le trou noir d’ennui du film, son rythme erratique et son écriture littérale.
En salles le 25 décembre