Dans Lorelei, après quinze années passées en prison pour braquage à main armée, Wayland décide d’emménager chez Dolores, son amour de jeunesse. Mais elle a désormais trois enfants, et il doit réussir à trouver sa place…
Premier long-métrage pour la réalisatrice Sabrina Doyle, que vous connaissez peut-être pour certains de ses courts-métrages diffusés sur Arte ou pour ses travaux en tant que journaliste à la BBC. Lorelei se rapproche d’une oeuvre télévisuelle, et lorsque l’on observe le parcours de la réalisatrice, on comprend mieux pourquoi !
Le milieu carcéral est un sujet surexploité au cinéma, que l’on évoque l’enfermement en lui-même ou ce que l’on devient lorsqu’on peut finalement en sortir. Lorelei n’échappe pas à la règle et vient se placer dans le second cas en nous présentant le personnage de Wayland, après quinze années passées dans une cellule. En décidant de s’intéresser uniquement à la vie qu’il mène après sa peine, Sabrina Doyle fait le choix d’éviter la ligne narrative répétitive de la rédemption, celle qui touche un personnage hanté par ses actions néfastes et accomplissant petit à petit l’opposé.
Ici, le film commence à un moment de sa vie où nous ne possédons pas toutes les clés pour saisir directement l’essence du personnage : que s’est-il exactement passé pour qu’il soit emprisonné aussi longtemps ? À quoi pouvait ressembler sa vie avant ? Que lui est-il arrivé pendant les quinze années passées derrière les barreaux ? Nous avons donc l’impression d’avoir raté quelque chose, tout comme Wayland qui a vu sa vie se figer durant de nombreuses années.
À plusieurs reprises dans le film, Dolorès (Gena Malone) lui répète que les trois enfants qu’elle a auraient été les siens s’il n’avait pas été en prison. Ce qu’elle désire, c’est un changement radical qui intervient suite au surmenage lié à son travail en tant qu’agent d’entretien mais également son rôle de mère. Derrière ce personnage de femme seule, qui aurait pu être un simple stéréotype, se cache un personnage plus intéressant que celui avec qui nous passons la plupart du temps (Wayland, joué par Pablo Schreiber). Sa présence s’accompagne alors de longueurs et d’une réflexion inaboutie sur le problème de réinsertion aux États-Unis, où la probation est additionnée à un délaissement des plus injustes, pouvant alors replonger les ex-incarcérés en prison puisqu’ils ne sont pas aidés pour retrouver un travail.
Lorelei décide plutôt de s’intéresser aux relations humaines, celles qui lient Wayland, Dolorès et ses trois enfants. Elles transforment le film en un récit de tendresse qui l’impose malgré lui à occuper un rôle qui n’est pas le sien, une figure paternelle qui a toujours été absente auparavant. Si le film nous intéresse par son histoire, son manque de mise en scène et de partis pris l’impactent très fortement, donnant parfois l’impression d’être face à un épisode de série télévisée ou d’un téléfilm. Composé en grande partie de plans fixes, il peine à nous plonger entièrement dans les quelques séquences qui pourraient bien nous émouvoir : cette quête de liberté entravée au bord de la mer, et qui prend tout son sens à sa toute fin.
En s’éloignant de la rédemption personnelle pour préférer l’accomplissement et la fin d’une vie de souffrance pour ses personnages, Sabrina Doyle permet à Lorelei de briser les chaînes et de prendre tout son sens malgré sa mise en scène plate et son personnage principal inexpressif.