Knives and Skin est un premier long-métrage ambitieux et un réquisitoire pour l’émancipation féminine. Une liberté qui est sans cesse questionnée par des actions répulsives de la part des hommes.
Premier long-métrage de Jennifer Reeder, Knives and Skin est un film qui mélange avec habileté le drame avec un humour implacable. Lorsqu’une femme est tuée par un homme, c’est toute la ville qui cherche à la retrouver…
Knives and Skin est un film qui ne plaira pas à tous, il est doté d’une véritable patte artistique et une volonté narrative éprouvante, mais si on se laisse tenter par la vie bouleversante d’adolescents, on y adhère. Jennifer Reeder y érige un portrait habile de la société actuelle, dévastée par les méfaits et l’inégalité, l’irrespect et l’égoïsme des Hommes et des hommes. Dès son introduction, elle présente cette notion d’irrespect envers la femme et l’égoïsme de son copain qu’on déteste immédiatement. Ce que veut montrer le film, c’est que les conséquences d’un acte peuvent aller loin, du côté des victimes mais également du côté des bourreaux.
Sa grande force réside dans sa construction des personnages et leur identité. On part d’un drame (la disparition d’une adolescente) à une ouverture vers d’autres thématiques et d’autres enjeux sociaux comme la notion de consentement, le deuil, mais aussi la solitude, les relations toxiques et la vie sans soutien. Chaque personnage a une importance capitale pour l’avancée du récit, nous découvrons par exemple la mère de la disparue qui sombre petit à petit dans une dépression, avec cette obsession (tout à fait compréhensible) de retrouver la personne la plus chère à son coeur. La représentation est féministe et assumée : on aurait pu découvrir un père qui recherche sa fille, un père et une femme qui recherchent leur fille, mais il s’agit ici d’une mère seule qui doit endosser cette responsabilité.
Comme dans la récente série 13 Reasons Why de Netflix, il s’agit d’exposer la vie d’autrui après l’incident et de développer les émotions, les sentiments, les motivations des différents personnages. Dans Knives and Skin, on retrouve cette importance de l’identité : chacun est différent et les personnages sont tous iconisés par des costumes délirants et des maquillages propres à eux. Derrière cette apparence parfois trompeuse, se trouve la vraie personne, et certains personnages sont confrontés à une identité qui leur colle littéralement à la peau, comme celui de l’agresseur qui porte cette culpabilité en lui, comme si l’odeur de sa victime était éternelle. Le soutien des femmes entre elles est essentiel à leur survie dans un monde rempli de masculinité toxique, et ce sont les scènes de chants qui les rassemblent.
Knives and Skin est un film engagé et féministe, tout en portant un regard dérisoire, parfois absurde et souvent ironique sur des sujets graves qui font l’actualité.