Les rappeurs légendaires The Notorious B.I.G et Tupac Shakur sont respectivement assassinés en 1997 et 1996. Dans City of Lies, l’inspecteur Russell Poole enquête sur des affaires qui semblent croiser la route de ses assassinats historiques…
Si le calendrier cinématographique a déjà été bien chamboulé par la COVID-19 et les fermetures des salles de cinéma ces derniers mois, d’autres éléments viennent perturber la sortie de City of Lies, initialement prévu pour 2018. Accusé de violence par un membre de l’équipe (accusations finalement démenties par la scripte), la star du film Johnny Depp, par sa renommée médiatique, fait scandale et le film reste très longtemps sans distributeur. Après avoir relaté la vie d’un agent spécial confronté au clan de Pablo Escobar dans Infiltrator (avec Bryan Cranston), le réalisateur Brad Furman s’attaque cette fois-ci à une enquête bien plus complexe… Le film est présenté en avant-première au Festival du cinéma américain de Deauville.
Des images croisées
City of Lies n’est pas un film d’enquête sur les assassinats de The Notorious B.I.G et de Tupac Shakur. Si c’est ce que vous souhaitez ou pensez découvrir, passez votre chemin. Le film se base sur la vie de l’inspecteur Russell Poole pour couvrir les enquêtes importantes de sa carrière (étrangement reliées entre elles). La voix-off a une place prédominante dans la première partie du film qui a pour cœur l’utilisation d’archives afin d’implanter son contexte, comme pour témoigner dès le début de la véracité de son sujet.
Nous découvrons ensuite l’incident principal en faisant connaissance avec Russell Poole, un détective qui semble savoir ce qu’il fait. Pour ceux qui souhaitaient découvrir une enquête sur les assassinats de The Notorious B.I.G, cet incident pourrait faire penser à plus d’une personne qu’il s’agit de cela. La présence d’archives dans le film est un atout pour balayer rapidement le contexte difficile de la guerre entre les deux côtes américaines (East vs West), et elles proviennent presque toujours de la télévision que regarde les personnages. Si Brad Furman décide d’utiliser les archives, c’est également pour se faciliter la tâche et espérer que le spectateur retienne toutes les informations qu’on lui communique. S’il peut nous ramener à la réalité, il est également un signe révélateur du trop-plein d’informations.
Retour vers le passé
Tout est une question de point de vue. Cette affirmation – d’autant plus vraie dans le contexte d’un film basé sur une histoire vraie -, est la grande question soulevée dans City of Lies. Certains films abordent les histoires vraies en suivant l’ordre chronologique de son déroulé, et parfois avec trop peu de recul (on pense notamment à Bac Nord, récemment sorti en salles). Celui-ci décide plutôt d’axer l’enquête dix-huit ans après l’incident, en mélangeant les points de vue avec celui du détective qui a vécu l’enquête, ainsi que du journaliste Jack Jackson qui tente d’y voir plus clair. Le spectateur se place ainsi immédiatement du côté de Jack Jackson.
Etre bavard n’est pas toujours un défaut, mais ici, le nombre d’enquêtes qui s’entremêlent rendent City of Lies extrêmement confus pour le spectateur. Il est également difficile de s’accrocher aux deux personnages principaux interprétés par Forest Whitaker et Johnny Depp, se débrouillant comme ils peuvent dans des rôles de personnages sous-caractérisés, malgré quelques maigres efforts scénaristiques tentant de les rendre plus consistants. Presque vingt ans après les évènements du film (notamment les assassinats des rappeurs), les affaires n’ont toujours pas été résolues. Ainsi, tout point de vue devient une simple théorie, et suivre un détective hanté par cette affaire exacerbe sa gravité. Il y a une certaine magie dans cette manière d’aborder le passé, comme un personnage issu de la science-fiction qui y retournerait chercher des preuves.
City of Lies, c’est l’histoire d’une affaire dans l’Affaire. Si son introduction donne envie de découvrir la suite, plus le film avance et plus le spectateur se perd dans le suivi de l’enquête. Johnny Depp y tient un rôle anecdotique, et la réalisation de Brad Furman ne comble pas ses vilains défauts.